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Continuer de partager Noël

Continuer de partager Noël – Pièce de Noël écrite en 2019 par la pasteure Sophie Letsch. C’est l’histoire de quatre paroissiens fidèles qui jouent la traditionnelle saynète de Noël car il n’y a pas d’enfants dans la paroisse pour le faire. Cette situation les décourage. Mais ils décident finalement que l’essentiel de Noël vaut la peine d’être partagé.

Pièce pour 5 personnages adultes : Marie, Joseph, Ange, Berger, pasteur/narrateur

Tous les personnages sont cachés. L’ange est sur la chair, assis pour ne pas qu’on le voit. Marie et Joseph sont en coulisses d’un côté, le berger aussi mais de l’autre côté. Le pasteur/narrateur est derrière l’autel. Dans la première partie de la scène, les acteurs ne regardent pas l’assemblée.

Pasteur :

En ce temps-là, l’empereur Auguste donna l’ordre de recenser tous les habitants de l’empire romain. Ce recensement, le premier, eut lieu alors que Quirinius était gouverneur de la province de Syrie. Tout le monde allait se faire enregistrer, chacun dans sa ville d’origine. Joseph lui aussi partit de Nazareth, une ville de Galilée, pour se rendre en Judée, à Bethléem, là où était né le roi David ; en effet, il était lui-même un descendant de David. Il alla s’y faire enregistrer avec Marie, sa fiancée, qui était enceinte.  (Joseph et Marie arrivent doucement sur scène. Il la soutient.)

Marie : Joseph, je suis tellement fatiguée. Le voyage a été si long.

Joseph : Je sais Marie. Prends courage, nous sommes presque arrivés. (Marie s’arrête)

Marie : Je n’en peux plus. Il faut trouver un endroit pour passer la nuit. L’enfant va naitre bientôt Joseph, ce n’est plus qu’une question d’heures.  (Joseph cherche une chaise pour Marie)

Joseph : Tiens repose-toi un peu. (Elle s’installe.)

Marie : Merci. (Joseph a l’air de réfléchir, un peu découragé et un peu énervé il trépigne. Puis il va chercher une autre chaise et s’installe à son tour)

Marie : (elle chuchote mais suffisamment fort pour que le public l’entende) Mais non. Qu’est-ce que tu fais ? Tu dois rester debout. Appuyé sur ton bâton.

Joseph : Oui je sais… Mais moi aussi je suis fatigué.

Marie : Tu es fatigué ?

Joseph : Oui je suis fatigué. J’en ai marre quoi !

Marie : Mais enfin qu’est-ce que tu racontes ? Ce n’est pas ce qui est écrit dans le texte ! Tu dois rester debout, appuyé sur ton bâton et dire : « La route a été longue. Mais je suis heureux que l’enfant naisse à Bethléem dans la ville de mes ancêtres, dans la ville du grand roi David ».

Joseph : Oui, oui, je sais ce qui est écrit dans le texte. Mais je n’ai pas envie de le dire. Je n’ai pas envie de continuer à jouer la pièce.

Marie : Quoi ? Mais pourquoi ?

(L’ange se lève en haut de la chair) Ange : N’ayez pas peur ! Car je vous annonce une bonne nouvelle qui réjouira beaucoup tout le peuple… (Le berger débarque sur la scène et lui coupe la parole)
Berger : Attend, attend, je ne suis pas encore en place !

Ange : Qu’est-ce que tu dis ?

Berger : Je n’ai pas eu le temps de me mettre en place !

Marie : Non, non, mais attendez toutes les deux. On n’y est pas encore ! Vous devez encore rester en coulisse. Il faut d’abord que le narrateur raconte la naissance de l’enfant.

Joseph : Mais moi, je ne veux pas continuer la pièce.

Berger et Ange : Quoi ?

Joseph : Vous avez bien compris. Je n’ai pas envie de continuer à jouer la pièce. D’ailleurs je vais enlever ce truc (il enlève une partie de son costume).

Marie : Mais non enfin !

Berger : Qu’est ce qui lui prend ?

Ange : Allé, allé ce n’est pas grave. Oublions tout ça. Remet ton costume et on reprend depuis le début !

Joseph : Non, non et non ! (il croise les bras)

Pasteur : Qu’est ce qui se passe ?

Marie : Joseph ne veut pas continuer la pièce !

Pasteur : Ah bon ? Mais pourquoi ? Et on fait quoi ?

Marie : Et bien je ne sais pas moi ! D’habitude il est toujours partant pour jouer une pièce de théâtre. On le fait tous les ans !

Ange : Mais oui cela fait plusieurs années qu’on prépare ensemble une pièce pour Noël. Je trouve qu’on forme une bonne équipe.

Joseph : Cela fait plusieurs années, c’est vrai. Mais ça n’a pas toujours été comme ça !

Marie : Mais bien sur que si ! Ecoute, je me souviens très bien, quand tu étais petit, tout juste haut comme ça ; Tu étais déguisé en berger sous le sapin de l’église, le soir de Noël.

Joseph : Oui c’est vrai, je m’en souviens aussi ! J’étais très impressionné. Ce sont de beaux souvenirs. Mais justement, ce sont toujours les enfants qui ont joué les pièces de Noël. Alors que là… écoutez… franchement… Vous ne trouvez pas qu’on commence à se faire un peu vieux pour ça ?

Berger : Parle pour toi ! Moi je ne me sens pas encore vieux !

Ange : Moi non plus !

Marie : Moi je suis toujours jeune, dans ma tête !

Joseph : Oui d’accord, tu as raison. Mais vous comprenez ce que je veux dire n’est-ce pas ?

Marie : Bon c’est vrai… Marie est une toute jeune fille qui attend son premier enfant. Ce n’est plus tout à fait mon cas. Je n’ai plus vraiment l’âge pour jouer ce rôle-là… (elle enlève une partie de son costume)

Berger : Et moi je suis tout seul à jouer le berger ! Ils devraient être très nombreux ! Un seul berger : c’est un peu ridicule ! (elle enlève une partie de son costume)

Ange : Oui c’est vrai vous avez raison ! Moi aussi je suis tout seul à faire l’ange alors que la Bible parle de toute une troupe qui remplit le ciel.

Joseph : Par contre la couleur de tes cheveux est adaptée : magnifiquement blancs ! Comme ceux d’un ange

Ange (rit) : Merci pour ce compliment ! Moi je suis fièr de mes cheveux blancs. Et, tant que je peux encore le faire, ça me fait plaisir de jouer la pièce de Noël avec vous!

Marie : Moi aussi ça me fait plaisir, ce n’est pas la question. Je comprends ce qu’il veut dire. C’est décourageant quand il n’y a plus d’enfants !

Berger : C’est vrai qu’il y a de moins en moins de baptêmes. Et c’est encore pire pour les confirmations !

Joseph : Le dimanche matin, nous ne sommes pas toujours très nombreux.

Marie : Et les bénévoles, ils sont si difficiles à trouver !

Ange : Ah oui ça c’est vrai. Tout le monde aime le charme de nos petites églises avec leurs poêles à bois. Mais quand il s’agit de se lever avant l’aube pour faire du feu, il n’y a plus personne !

Joseph : Voilà. Je vois que vous avez compris ce que je veux dire. Je me demande où on va. Quel est le sens de tout cela ? Est-ce que ce n’est pas dépassé de se retrouver à l’église ? Pour Noël ? Qui connait encore l’histoire du premier Noël ? Ce que les enfants attendent, c’est le Père Noël ! Pas la naissance de Jésus…

Pasteur : Euh… Ecoutez. J’entends bien tout ce que vous dites. Et je suis même d’accord avec vous. Seulement… Il n’y a que vous ! Et puis, surtout, retournez-vous. Nous ne sommes pas seuls ce soir… (Les acteurs se tournent vers l’assemblée, l’air étonné) On est même plutôt nombreux ! (Les acteurs dévisagent les membres de l’assemblée, peuvent faire semblant de compter)

Joseph : Ca alors, mais c’est vrai !

Berger : In-cro-yable !

Marie : Et, regardez, il y a même des enfants !

Berger : In-cro-yable !

Pasteur : Et oui, ce n’est pas la répétition-là. ça y est. On y est vraiment ! Et les gens sont là.

Berger : In-cro-yable !

Joseph : Alors ça !

Ange : Bon, qu’est-ce qu’on fait maintenant ?

Pasteur : Et bien. Là je ne sais pas trop du coup… Bon, pour le moment, peut-être que la chorale pourrait chanter. Ca laissera le temps de réfléchir…

Marie : Bonne idée !

Ange : Attendez-moi, je descends ! Dommage que je ne puisse pas voler vraiment…

Berger : (fait des photos avec son téléphone) In-cro-yable !

 

Chant de la chorale : Quand Dieu nait dans la nuit profonde

 

Les acteurs se rassemblent devant l’autel Ange : C’est si beau !

Berger : Oui, moi aussi j’aime ce chant.

Ange : La musique est belle. Mais ce sont surtout les paroles qui me touchent : « Quand Dieu nait dans la nuit profonde, l’espoir renait dans notre nuit ».

Marie : Dans notre nuit. C’est vrai que parfois il fait très sombre dans nos vies. Quand la maladie nous frappe. Ou quand surgit la mort de l’un de nos proches.

Berger : Quand nous avons peur. Peur de la violence, peur du terrorisme ou du réchauffement climatique.

Marie : Peur de la mort !

Ange : Quand nous sommes seuls. Abandonnés, délaissés, rejetés ou incompris.

Marie : Tout ça, c’est la nuit. La nuit de nos vies. Et c’est là, dans la nuit de nos vies, que vient Dieu. C’est là, dans la nuit de nos vies, que nait Dieu.

Joseph : Voilà ! C’est ça le sens de Noël. Dieu est venu éclairer la nuit de nos vies ! Nous ne sommes plus jamais seuls ! Voilà le message à faire passer. Voilà ce qui vaut la peine d’être partagé.

Tout le reste, les illuminations et les sapins décorés, les cadeaux aux petits, les grand festins et les familles réunies ; tout cela, c’est agréable, ça fait chaud au cœur. Mais ce n’est pas le plus l’important.

L’important, ce qu’il y a à fêter aujourd’hui, c’est que Dieu vient nous rejoindre, sans faire de bruit, dans la nuit de nos vies. Il vient nous éclairer. Il vient pour tout changer.

Marie : Dis donc, tu t’envoles là !

Ange : C’est beau ce que tu dis.

Berger : Tu pourrais faire la prédication !

Pasteur : Et bien oui pourquoi pas ! Je laisse ma place volontiers ! L’histoire de Noël, chacun peut la raconter. Elle n’est pas réservée à certains privilégiés. Les tous premiers qui l’ont partagée, c’étaient les bergers. Des gens pauvres, des marginaux qui vivent dans la nuit et dont on se méfie. Ils sont venus voir Jésus. Et quand ils sont repartis, ils ont raconté ce qu’ils avaient vu et entendu. C’est grâce à eux que nous connaissons l’histoire de Noël. C’est grâce à eux que nous sommes là ce soir et que nous pouvons le fêter.

Berger : Ils ont quand même la classe ces bergers ! ( remet son costume).

Ange : Les gens sont venus ce soir. Ils sont là ! Ils n’étaient pas obligés de venir mais ils sont là ! Et moi aussi je suis encore là. Ce qui se passera après moi, ça ne me concerne pas. Mais pour l’instant je suis là et j’ai envie de partager ma foi, ce en quoi je crois. Allez, vous êtes avec moi ?

Marie : Oui. Moi aussi j’ai envie de partager ce qui me tient debout tous les jours. C’est pour ça que je suis là, encore aujourd’hui, à jouer le rôle de Marie. (Elle remet son costume). C’est trop important pour moi !

Ange (à Joseph) : Bon et toi ? Tu fais quoi ?

Joseph : Et bien moi, moi je vous suis pardi ! Je ne peux pas faire autre chose que de partager ce que j’ai compris : Dieu est là, au cœur de nos nuits. Il veut éclairer nos vies.

Pasteur : Bon ben alors ? On y va ? On recommence depuis le début ?

Marie : Ah oui mais pas tout de suite ! On n’est pas encore prêts !

Berger : Il faut d’abord qu’on se mette en place.

Joseph : Je dois d’abord encore remettre ce truc (une partie de son costume).

Ange : Et moi il faut que je remonte sur mon perchoir.

Pasteur : Ah oui je comprends mais il commence à se faire tard là. Ecoutez, je vais demander à l’assemblée de chanter pendant que vous vous mettez en place.

Marie : Bonne idée !

Pasteur (à l’assemblée): Vous voulez bien ?

Chant de l’assemblée

Pendant le chant, on installe la crèche. Les acteurs ajustent leurs costumes, mettent de l’ordre sur la scène et retournent en coulisse comme au début.

Pasteur : En ce temps-là, l’empereur Auguste donna l’ordre de recenser tous les habitants de l’empire romain.

Ce recensement, le premier, eut lieu alors que Quirinius était gouverneur de la province de Syrie.

Tout le monde allait se faire enregistrer, chacun dans sa ville d’origine. Joseph lui aussi partit de Nazareth, une ville de Galilée, pour se rendre en Judée, à Bethléem, là où était né le roi David ; en effet, il était lui-même un descendant de David.

(Joseph et Marie traversent la scène doucement. Il la soutient. )

Il alla s’y faire enregistrer avec Marie, sa fiancée, qui était enceinte. Pendant qu’ils étaient à Bethléem, le jour de la naissance arriva.

(Ils reviennent sur scène, elle tient l’enfant dans ses bras)

Elle mit au monde un fils, son premier-né. Elle l’enveloppa de langes et le coucha dans une mangeoire, parce qu’il n’y avait pas de place pour eux dans la salle destinée aux voyageurs.

(Marie installe le bébé dans la crèche et s’assied à côté. Joseph se tient debout. Sur le côté de la scène, le berger apparait)

Dans cette même région, il y avait des bergers qui passaient la nuit dans les champs pour garder leur troupeau.

(L’ange se lève en haut de la chair et étend les bras)

Un ange du Seigneur leur apparut et la gloire du Seigneur les entoura de lumière. Ils eurent alors très peur. Mais l’ange leur dit : « N’ayez pas peur, car je vous annonce une bonne nouvelle qui réjouira beaucoup tout le peuple : cette nuit, dans la ville de David, est né, pour vous, un sauveur ; c’est le Christ, le Seigneur ! Et voici le signe qui vous le fera reconnaître : vous trouverez un nouveau-né enveloppé de langes et couché dans une mangeoire. »

Tout à coup, il y eut avec l’ange une troupe très nombreuse d’anges du ciel, qui louaient Dieu en disant : « Gloire à Dieu dans les cieux très hauts, et paix sur la terre pour ceux qu’il aime ! »  (L’ange disparait)

Lorsque les anges les eurent quittés pour retourner au ciel, les bergers se dirent les uns aux autres : « Allons donc jusqu’à Bethléem : il faut que nous voyions ce qui est arrivé, ce que le Seigneur nous a fait connaître. »  (Le berger s’avance jusqu’à la crèche)

Ils se dépêchèrent d’y aller et ils trouvèrent Marie et Joseph et le nouveau-né couché dans la mangeoire.  (Le berger s’agenouille devant la mangeoire)

Quand ils le virent, ils racontèrent ce que l’ange leur avait dit au sujet de ce petit enfant. Toutes les personnes qui entendirent les bergers furent étonnées de ce qu’ils leur disaient.  Quant à Marie, elle gardait tout cela dans sa mémoire et elle y réfléchissait profondément.   (Le berger se lève et repart en sautillant)

Puis les bergers prirent le chemin du retour. Ils chantaient la gloire de Dieu et le louaient pour tout ce qu’ils avaient entendu et vu, car tout s’était passé comme l’ange le leur avait annoncé. (Les acteurs vont rejoindre la chorale et chantent en costume.)

Chant de la chorale : Réjouis toi, voici ton roi

Crédits : Sophie Letsch (UEPAL) – Point KT