1

Jésus et la Syro-phénicienne : Jésus hésite sur l’universalité de sa mission

Fuyant de possibles représailles à la suite d’un enseignement sur le pur et l’impur, enseignement qui menaçait une certaine compréhension du rapport à l’autre, Jésus se retire dans les territoires étrangers, en plein cœur des régions considérées à l’époque comme étant véritablement impures. Texte : Matthieu 15/21-28

Eléments d’explication :

–    Jésus a quitté Jérusalem pour le territoire de Tyr et de Sidon en Syro-Phénicie (région située au nord de la Judée et limitrophe de la Galilée) : c’est un territoire païen. L’expression a une valeur plus théologique que purement géographique, elle sert avant tout à désigner les nations païennes.

–    Une « Cananéenne » vient voir Jésus : ici, l’appellation « cananéen » est utilisée pour désigner les habitants autochtones de la Syro-Phénicie. Le terme de Canaan n’est pas toujours utilisé pour désigner la même chose selon les périodes de l’histoire d’Israël : le terme a été notamment utilisé pour désigner la terre promise ; à l’époque de Jésus, il est utilisé pour désigner la Syro-Phénicie.

–    Cette femme est païenne, mais elle a manifestement entendu parler de Jésus et de manière suffisamment précise pour le désigner avec le titre de « Fils de David ».

–    « ma fille est tourmentée par un démon » : c’est la manière dont on désigne à l’époque la maladie (psychique en particulier). La médecine est très sommaire et la psychiatrie n’existe pas : les gens expliquent donc la maladie (surtout les maladies psychiques) par la possession démoniaque.

–    « Renvoie-la » (autre traduction possible : « fais-lui grâce ») : les disciples veulent se débarrasser de cette femme qui les suit en criant, quitte à ce que Jésus lui accorde ce qu’elle demande.

–    « Je n’ai été envoyé qu’aux brebis perdues d’Israël » : trois interprétations de ce refus sont possibles.

1. Le refus de Jésus est pédagogique : il veut mettre à l’épreuve la « foi » de la femme (dans quelle mesure lui fait-elle confiance ? vient-elle vers lui comme vers n’importe quel autre guérisseur ?)

2. Le refus de Jésus est lié à la manière dont il comprend sa mission : il se considère comme envoyé avant tout à Israël, l’annonce de l’Évangile aux païens ne devant avoir lieu que dans un second temps (après la mort et la résurrection du Christ). D’autres passages de l’évangile de Matthieu soutiennent cette interprétation (8/5-13, 21/33-44, 28/16-20). Jésus sait que son temps est compté, il veut donc aller à l’essentiel : convertir et rassembler Israël, le rôle de ce nouvel Israël étant ensuite de porter l’Évangile aux quatre coins du monde. Le risque de cette attitude est de ne plus voir que l’objectif : mais Jésus se laisse interpeller et toucher, il sait se remettre en question, apprendre et évoluer.

3. Le refus de Jésus est destiné aux disciples pour les préparer à la mission qui les attend un jour : comme tous les Juifs de leur temps, ils se tiennent à l’écart des païens (les méprisant parfois). Là, ils sont prêts à accorder un miracle à la femme pour de mauvaises raisons (avoir la paix !). Le refus puis l’acceptation de Jésus portent peut-être en creux le message : l’Évangile doit être annoncé à tout humain.

–    « brebis perdues d’Israël » : l’expression peut désigner soit Israël tout entier, soit les « pécheurs » en Israël.

–    Réaction de la femme : elle reconnaît la place particulière d’Israël dans l’accès au salut (façon de reconnaître que c’est la foi juive qui conduit au salut pas les religions païennes) et demande à en recevoir une part, même petite.

–    Jésus reconnaît sa foi et lui accorde ce qu’elle demande : il ouvre ainsi la porte à l’annonce de l’évangile aux païens (même si c’est encore dans des cas exceptionnels), cela préfigure ce qu’il commandera à ses disciples : aller dans le monde entier et faire, de tous les peuples, des disciples.

Attention : Il faut être prudent avec la notion de « peuple élu » : l’élection d’Israël n’est en aucun cas à comprendre comme une supériorité d’Israël sur les autres peuples. L’élection est une mise à part pour servir : Israël a pour rôle de témoigner en ce monde de l’amour de Dieu, d’être messager de Dieu et ce rôle est présenté dès l’Ancien Testament comme provisoire jusque la conversion des nations païennes.
La réponse de Jésus n’est pas condescendante ni basée sur un complexe de supériorité. Il faut avoir à l’esprit que Jésus sait que son temps est compté, il semble donc vouloir aller à l’essentiel : convertir et rassembler Israël, le rôle de ce nouvel Israël étant ensuite de porter l’Évangile aux quatre coins du monde.
Dans le même ordre d’idée : Jésus dit et révèle à ses disciples certaines choses qu’il cache aux foules qui viennent l’écouter. Ce n’est pas par mépris pour les foules, mais par souci de pédagogie : quand la révélation sera pleine et entière avec la mort et la résurrection de Jésus-Christ, les disciples auront les éléments et le temps nécessaires pour enseigner le peuple et convertir les nations.

À faire…. Quelques pistes…

Prière :

Aide-moi à me souvenir que tu aimes tous les humains. Apprends-moi à voir en chacun d’eux un frère ou une sœur que je dois respecter et secourir si nécessaire. Amen.

Chant :

Seigneur, tu cherches tes enfants (Arc-en-ciel 536 – Alléluia  36/22)

Animations :

–    Avant de raconter, on peut demander aux enfants s’ils pensent que Dieu veut s’adresser à tous les humains ou s’ils parlent plus à certains qu’à d’autres (on peut jouer l’avocat du diable : il doit parler plus aux hommes qu’aux femmes, puisque presque tous les prophètes sont des hommes…). On peut alors s’appuyer sur les doutes qui surgiront pour commencer l’histoire : Jésus aussi a eu des doutes, il pensait qu’il devait parler en priorité au peuple d’Israël, parce qu’il n’avait pas beaucoup de temps… mais alors qu’il était en territoire païen, il a rencontré une femme qui …

–    Bricolage : préparer un grand dessin d’une église (pourquoi pas l’église du village) ou une église en trois dimensions (en carton) et demander aux enfants de découper dans des revues des personnes de tous âges, de toutes couleurs… et de les coller sur l’église. Une fois recouverte de visages de toutes les couleurs, cette église dira bien que l’Eglise est constituée de gens différents car Dieu offre son amour à tous les hommes sans distinction.

 Crédit : Claire de Lattre-Duchet (UEPAL) Point KT